Conseil départemental des Bouches-du-Rhône

Les vaccins à ARN messager...Ce qu'il faut savoir

Pour tout comprendre des vaccins à ARN messager, interview de Rémi Charrel, professeur en virologie et président du Comité de lutte contre les infections nosocomiales à l’AP-HM.

Les deux premiers vaccins mis sur le marché en France par Pfizer-BioNTech et Moderna sont des vaccins à ARN messager. Pouvez-vous nous expliquer la spécificité de ces vaccins ?

Rémi Charrel : Le vaccin à ARN messager est un vaccin qui consiste à utiliser le gène du virus qui génère la formation de la protéine de Spike (la protéine de Spike permet au Covid-19 d’entrer dans les cellules hôtes, NDLR). Ce morceau d’ARN messager est mis dans des microgouttelettes et est injecté dans le bras. Les cellules du corps humain qui vont alors recevoir cet ARN messager vont synthétiser la protéine du virus. On va en quelque sorte leurrer le système immunitaire en lui faisant produire une réponse protectrice contre la protéine de Spike. Ultérieurement, si le sujet vacciné est infecté, le système immunitaire est préparé à détruire le virus.
L’un des premiers avantages des vaccins à ARN messager, c’est qu’ils sont simples et peuvent être développés très vite.
Deuxième atout : ils apportent une réponse immunitaire importante et ce, sans qu’il y ait besoin d’adjuvants.

Que répondez-vous à ceux qui disent que les vaccins à ARN messager peuvent modifier nos génomes ?

R. C. : Notre corps est affecté en permanence par des virus et il y a de l'ARN messager partout dans ces virus. Ça n'affecte pas notre patrimoine génétique pour autant. Il faut bien sûr faire de la pharmacovigilance mais il n’y a aucune raison de penser qu’il puisse y avoir modification du génome. Prenons par exemple le vaccin contre la rougeole, un autre virus à génome ARN. C’est un vaccin que l’on connait bien, depuis longtemps et il n’y a pas de modification de l’ADN humain.

Les vaccins sont-ils efficaces sur les nouveaux variants ?

R. C. : Cela reste à confirmer mais il semblerait que ce soit le cas sur les variants que nous connaissons aujourd’hui. Ce qui ne veut pas dire que dans l’avenir, il ne puisse pas y avoir des variants qui résistent au vaccin. La technologie ARN messager pourrait toutefois permettre aux laboratoires d’adapter leurs vaccins très rapidement.

Les vaccins suffiront-ils à nous protéger ? Et pendant combien de temps ?

R. C. : Il faut que 70 % de la population soit vaccinée pour arriver à une immunité collective qui permette de rompre la chaîne de transmission. Il va donc falloir continuer à appliquer les gestes barrières.
Nous ne savons pas encore quelle est la durée de l’immunité procurée par le vaccin. Mais elle est sûrement de plusieurs mois.

Doit-on s’attendre à des effets secondaires ?

R. C. : Il y a forcément des réactions, quel que soit le médicament que l’on prend. C’est pour cela que l’on a mis en place, en France comme dans le monde entier, des systèmes de pharmacovigilance. Le suivi des données se fait de façon journalière et particulièrement avec les vaccins Covid. On peut avoir des maux de tête, ressentir une douleur au bras… Mais est-ce vraiment lié au vaccin lui-même ? Ça, personne ne peut le dire. Une étude a été faite il y a quelques années sur le vaccin de la grippe. Un groupe recevait ledit vaccin tandis qu’un autre se voyait injecter du sérum physiologique. On a constaté que le groupe qui avait reçu le sérum physiologique avait fait autant de réactions fébriles que le premier groupe (Nichol KL et al, 1995 N Engl J Med). Le simple fait d’injecter un corps étranger, ne serait-ce que du sérum physiologique, peut induire ce type de réactions. Cela s'appelle l'effet Nocebo.

Quel est le rapport bénéfices/ risques ?

R. C. : C’est très variable selon la population. C’est pour cela que la campagne de vaccination se fait en plusieurs temps et privilégie pour l’instant les plus âgés et les plus fragiles afin de réduire les formes graves et la mortalité. On n’a pas le même risque si on est dialysé, qu’on a plus de 75 ans ou qu’on cumule des facteurs de comorbidité ou si on est un jeune homme de 18 ans en parfaite santé.

Peut-on se faire vacciner si on a déjà eu la Covid-19 ?

R. C. : Oui. Il faut toutefois attendre trois mois après avoir été infecté par la Covid-19. Mais, en théorie, une personne qui a déjà rencontré le virus est protégée. Cette protection est toutefois variable selon les individus et nous manquons de recul pour l’instant.

Qui sera vacciné et quand ?

La première phase de la campagne de vaccination a débuté fin décembre 2020. Après les résidents des Ehpad vaccinés en priorité, ce sont le personnel des établissements accueillant les personnes âgées, les soignants et les pompiers de plus de 50 ans ou fragiles qui ont pu bénéficier du vaccin.

DEPUIS LE 18 JANVIER 2021, les personnes âgées de plus de 75 ans ainsi que les personnes présentant une des pathologies conduisant à un très haut risque de forme grave de la Covid-19 (insuffisance rénale chronique sévère, personnes transplantées d'organe, atteintes de cancers avancés, etc.), quel que soit leur âge, ont la possibilité de se faire vacciner sur rendez-vous dans l'un des centres de vaccination ouverts sur l'ensemble du territoire.

AU PRINTEMPS 2021, la deuxième phase de la campagne de vaccination s'adresse aux personnes âgées de plus de 65 ans vivant à domicile. Puis la troisième phase élargira la vaccination tout d'abord aux personnes de plus de 50 ans puis aux professionnels des secteurs essentiels au fonctionnement du pays (sécurité, éducation, alimentaire), aux personnes vulnérables et précaires et enfin au reste de la population majeure.

COMMENT ÇA SE PASSE ? La vaccination contre la Covid-19 se fait en deux temps : une première injection intramusculaire dans le bras, suivie d'une seconde après un délai de trois à six semaines.